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04.06.06 Un refroidissement bipolaire de la Terre ?
 
L'analyse des sédiments déposés depuis 55 millions d'années, prélevés jusqu'à 430 m sous le plancher océanique en Arctique central durant la mission ACEX montreraient que le climat s'y est refroidi de manière synchrone avec l'expansion de glace au Groenland et à l'Est de l'Antarctique. Cette mission a été conduite par le consortium européen ECORD administré par l'INSU-CNRS. Deux laboratoires du CNRS sont impliqués dans l'analyse des échantillons. Les résultats, publiés dans la revue Nature du jeudi 1er juin, suggèrent que le refroidissement global aurait été contrôlé principalement par les gaz à effet de serre.

L'océan Arctique

L'océan Arctique influence fortement le climat global, par la glace de mer qui réfléchit fortement les rayons solaires et de par son rôle dans la formation d'eaux profondes froides et denses actionnant la circulation océanique globale. Mais son histoire n'est pas bien connue durant l'ère Cénozoïque, jusqu'à -65 millions d'années, par manque de mesures directes. Jusqu'à présent les meilleurs enregistrements paléoocéanographiques au centre de l'Arctique couvraient seulement la moitié du Pléistocène, de -500 000 ans à -200 000 ans. Ils avaient été obtenus par des forages d'une dizaine de mètres dans le plancher océanique.

Forer plus profond en Arctique constitue un défi technologique et humain relevé, en été 2004, par la mission ACEX (Arctic Coring EXpedition), dans le cadre du programme international de forages océaniques IODP (International Ocean Drilling Program). Cette mission, qui a coûté 12,5 millions de dollars, a été conduite par le consortium de 17 partenaires européens ECORD (European Consortium for Ocean Research Drilling), dont l'administrateur est l'INSU (Institut National des Sciences de l'Univers) du CNRS.

Le foreur Vidar Viking

Dans un premier temps une étude des profils de réflexion sismique a permis d'identifier une ligne sur la ride océanique de Lomonosov où des couches sédimentaires datant de l'ère Cénozoïque recouvrent la croûte continentale. L'opérateur scientifique de forage ESO (ECORD Science Operator) a utilisé deux brise-glaces afin de permettre le travail du foreur « Vidar Viking ». Neuf dixièmes de la surface de la mer étaient constamment occupés par de la glace parfois épaisse de deux à trois mètres, particulièrement dure et dense, suite à son accumulation durant plusieurs années. Malgré ces conditions difficiles, le Vidar Viking a pu être maintenu en position de forage durant 9 jours, au lieu des 2 jours initialement programmés. Quatre forages ont été effectués à différentes profondeurs allant jusqu'à 430 m sous le plancher de l'Océan Arctique, lui-même situé à 1 km sous la surface de la banquise. La combinaison de ces forages représente un enregistrement continu des sédiments déposés à l'ère du Cénozoïque.

Deux laboratoires du CNRS sont impliqués dans l'analyse des sédiments obtenus

Le CEREGE (Centre Européen de Recherche et d'Enseignement des Géosciences de l'Environnement), en collaboration avec l'Université de Rhode Island (USA), a contribué à établir un modèle d'âge des sédiments en fonction de la profondeur du forage. Pour ce faire, les inversions de la polarité de l'aimantation des sédiments ont été comparées à l'échelle de référence des inversions du champ magnétique de la Terre. Le laboratoire EPOC (Environnement et Paléoenvironnements océaniques) a participé avec l'USGS (United States Geological Survey) à la caractérisation des microfaunes marines de la partie la plus récente du forage (dernier million d'années).

Des plantes flottantes en Arctique

L'analyse des sédiments obtenus par ces forages montre que le pôle Nord, aujourd'hui synonyme de glace et de froid, a connu un climat subtropical il y a 55 millions d'années. L'océan Arctique était vert et parsemé de plantes aquatiques flottantes en été. La température de l'océan Arctique a approché les 23°C lors d'un maximum thermique. Ces conditions sont caractéristiques d'un environnement où l'effet de serre est prédominant. Le climat en Arctique central s'est refroidi depuis le milieu de l'Eocène, avec l'apparition de glace de mer et d'icebergs qui dominent aujourd'hui cet environnement glaciaire. Ce refroidissement s'est effectué de manière synchrone avec l'expansion de glace au Groenland et à l'Est de l'Antarctique, ce qui suggère que la transition du climat de la Terre s'est effectuée de manière bipolaire. Une telle transition bipolaire signifierait que le refroidissement global aurait été contrôlé principalement par les gaz à effet de serre plutôt que par les changements induits par la tectonique des plaques.

© CNRS

   
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