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21.05.07 Interrogations autour de la mission ExoMars
 
C'est au mois de Juin que l'Agence spatiale européenne devrait prendre une décision sur la poursuite du développement d'ExoMars, la première mission d'Aurora. L'objectif de ce programme est de développer des technologies dites " capacitantes " pour l'exploration du Système Solaire par des sondes automatiques et des hommes, et de rechercher des traces de vie sur Mars …

Première mission dite flagships d'Aurora, ExoMars a été décidé en 2003 mais son lancement a sans cesse été repoussé. Initialement prévu en 2009, on vise aujourd'hui la fenêtre de tir de 2013 avec un 'backup' en 2015.

Qu'attendre de cette décision ?

Aussi surprenant que cela puisse paraître, ni la configuration finale de l'architecture mission ni la conception du rover n'ont jamais clairement été définies ; les scientifiques et les ingénieurs du projet sont contraints de travailler sur plusieurs scénarii de mission ! Les charges utiles du Rover s'échelonnant de 8 kg à 16 kg suivant les options, et le Lander incluant ou non un paquet géophysique GEP, suivant le type de lanceur utilisé, mais aussi suivant les technologies utilisées pour l'atterrissage. De plus, on ne sait toujours pas si le relais de données, obligatoire si l'on veut pouvoir rapatrier les données de la mission, pourra être fourni par la mission américaine MRO.

En fin de compte, la principale pierre d'achoppement reste le 'nerf de la guerre', c'est-à-dire le financement du projet. Il faut savoir que les missions inscrites au programme Aurora font partie du programme facultatif, c'est-à-dire que chaque Etat, met, sur une base volontaire, de l'argent au 'pot commun'. Leur financement est dès lors des plus aléatoire et dépend du bon vouloir des gouvernements des Etats membres de l'ESA. Pour Aurora, c'est l'Italie le principal contributeur au projet.

La décision du mois de juin devra répondre aux questions en suspens. A savoir : quel lanceur, quel système d'atterrissage et quelle masse pourra être dédiée aux instruments scientifiques.

D'après nos informations, le financement actuel d'ExoMars ne permet qu'un lancement à l'aide d'un lanceur Soyouz, ce qui de facto limite la charge utile du rover à moins de 8 kg, loin des 16 kg initialement prévus pour la charge utile Pasteur. Cela remet en cause le paquet géophysique GEP, dont le consortium scientifique est mené par le DLR (Allemagne), avec le support du CNES et de l'Institut physique du Globe de Paris (IPGP). Cependant, le choix de cette option semble également difficile, car la mécanique spatiale impose des créneaux de lancements en 2013 et 2015 particulièrement défavorables en termes de masse possible pour la mission.

Les différentes options d'atterrisseur

Pour poser le Rover sur Mars, Thales-Alenia Space Turin (le maître d'œuvre du projet) a proposé deux systèmes d'atterrissage ; ces systèmes reposent tous deux sur l'utilisation de d'airbags ; leurs principes et les contraintes qu'ils imposent sur le système (et, en premier lieu, sur la masse qui peut être déposée au sol) sont différentes.

L'expérience MER (non vented airbags)

La première solution envisagée par l'ESA reprend le principe utilisé lors de la mission MER par la NASA. En janvier 2004, les rovers Spirit et Opportunity se sont posés sans encombre. Le système utilisé reposait sur l'utilisation d'un parachute déployé à plus de 8 km pour ralentir la sonde et compléter le freinage atmosphérique avant l'allumage de rétrofusées pour stopper la sonde en plein ciel. A 280 m d'altitude, une grappe de d'airbags s'est gonflée tout autour de l'engin pour le protéger de la dizaine de rebonds successifs avant son immobilisation complète. Notez que le premier a été mesuré à plus de 20 m !

Après avoir dégonflé ses airbags, le module de surface, en forme de trièdre se déploie, libérant le rover.

Cette configuration a deux inconvénients. Elle a semble-t-il montré ses limites en terme de masse, de sorte que le prochain rover de la NASA, le Mars Science Laboratory (2009) n'utilisera pas ce système pour atterrir sur Mars. Elle nécessite également une protection accrue tout autour du rover, 'à l'intérieur' des airbags, ce qui requiert une structure limitant d'autant la charge utile. Elle reste toutefois la préférée de l'ESA : on sait qu'elle marche ! Ce qui est capital pour le succès de la mission.

Configuration Vented airbag

L'alternative étudiée par l'ESA dit 'configuration Vented airbag' repose également sur l'utilisation de boudins gonflables mais utilisés de façon différente. Il s'agit d'utiliser un boudin en forme de tore ou de beignet (doughnut) sous l'engin qui le protégerait de l'impact contre la surface en absorbant l'énergie du choc, puis se dégonflerait progressivement. Ce système s'inspire des systèmes utilisés par les militaires pour larguer des charges lourdes depuis un avion.

Cette configuration nécessite toutefois l'utilisation d'un système de contrôle en attitude (en rotation) de l'atterrisseur qui garantisse que la structure porteuse du rover soit bien horizontale, au moment de son atterrissage, avec une vitesse transverse minimale. L'intérêt de cette configuration, c'est qu'elle autorise l'emport d'une charge utile un peu plus importante. L'inconvénient majeur, c'est qu'on ne lui connaît aucune application spatiale jusqu'ici et que l'on doit s'assurer de la validité du concept.

Le choix d'une Ariane 5 ?

En ce qui concerne le lanceur, l'ESA a pour l'instant le choix entre un lanceur russe Soyouz et une Ariane 5, nettement plus chère. Nous avons déjà vu que l'utilisation d'un lanceur Soyuz compromet une bonne partie du retour scientifique de la mission, en limitant drastiquement la charge utile scientifique que le Rover est capable d'emporter.

Dans la configuration la plus onéreuse, la puissance d'Ariane 5 permet d'envisager l'emport d'une plate-forme d'atterrissage plus grande et partant de là d'un module de descente également plus grand, ce qui permet de porter la charge utile Pasteur nominale à 16,5 kg et d'envisager sérieusement l'installation du Paquet Geophysique GEP (20 à 30 kg, suivant les configurations de charge utile retenues) répartis sur la plate-forme d'atterrissage.

Mais, ce n'est pas tout. L'autre avantage d'utiliser une Ariane 5 c'est bien entendu que la fusée pourrait également emporter un orbiter. Cet orbiteur, de type 'Mars Express' ou un peu plus petit, servirait alors de relais de communication entre le Rover et la Terre, ce qui permettrait de s'affranchir de la NASA qui en l'état fournira à l'ESA des fenêtres de communication entre le rover et la sonde Mars Reconnaissance Orbiter.

Mieux encore, l'orbiter ne sera pas seulement utilisé comme relais. Il serait également possible d'installer une suite d'instruments orbitaux d'environ 30 kg.

Mais tout indique que le choix de l'Agence sera avant tout dicté par des considérations financières ; le choix difficile qui se profile est le suivant : soit une mission basée sur un lanceur Soyouz, ce qui impliquera des révisions déchirantes en termes de retour scientifique, soit une mission basée sur un lanceur plus lourd, ce qui implique de retourner auprès des ministres des pays concernés pour quémander un surcroît de financement. Dans ce cas, l'ESA ne pourra probablement pas se passer du soutien de l'Allemagne et de la France, très impliquées dans le paquet géophysique.



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